«La Journée suisse du digital gagne en importance»


La cinquième Journée suisse du digital se tiendra le 10 novembre 2021. Elle doit permettre à la population de se familiariser avec la «Suisse 4.0». En amont de la manifestation, les personnes intéressées peuvent gratuitement développer leurs connaissances dans le cadre des Learning Labs organisés du 29 septembre au 9 novembre. L’offre est née d’une coopération entre digitalswitzerland et la FSEA. – Entretien avec Diana Engetschwiler, directrice du projet Journée suisse du digital.

La Journée suisse du digital est organisée cette année pour la cinquième fois. Qu’est-ce qui la rend si particulière pour vous et votre équipe ?
Diana Engetschwiler: Jusqu’à présent, le concept était de concentrer la manifestation sur une journée. L’an dernier, le coronavirus nous a contraints à modifier notre approche. Nous avons tout déplacé sur le canal numérique et organisé la manifestation sur trois jours. Les réactions ont été excellentes. Certains ont trouvé qu’il fallait plus d’un ou de trois jours pour exploiter réellement le potentiel de ce rendez-vous. Nous avons donc élaboré un nouveau concept avec une phase préliminaire de six semaines.

Que se passe-t-il pendant ces six semaines ?
Il s’agit d’une part de donner envie à la population de développer ses aptitudes dans le domaine numérique. Pour cela, des partenaires et associations proposent des cours en ligne et en présentiel, tous gratuits. Nous voulons montrer qu’il n’est pas difficile de faire le premier pas et à quel point il peut être passionnant de se former davantage dans le domaine numérique. Ensuite, nous entrons en dialogue avec la population. Nous souhaitons que les Suissesses et les Suisses nous disent quels sont les défis et les chances de la numérisation.

Les 6 et 7 novembre, nous organisons en outre le female Hackathon « herHack20.21 ». Nous voulons, par ce biais, positionner les femmes dans la branche des techniques de l’information. Nous organisons aussi une Journée du numérique le 10 novembre, lors de laquelle nous proposons à nouveau notre programme télévisé, tandis que 20 lieux organisent leur propre journée.

Quelle est la part des offres en ligne cette année ?
En raison de la crise sanitaire, nous en savons plus sur le numérique et utilisons davantage ce canal. Pourtant, les gens ont besoin de se rencontrer en personne. L’offre est actuellement équilibrée, avec une légère tendance aux rendez-vous en présentiel. Pour la génération plus âgée surtout, il est bien plus simple de se rendre quelque part pour y apprendre quelque chose que de se connecter à une plateforme en ligne. Pour quelqu’un qui n’a pas l’habitude d’utiliser les outils informatiques, ce n’est en effet pas une mince affaire. Nous allons proposer près de 400 Learning Labs gratuits pour enfants, adultes et séniors, tant sur place qu’en ligne.

Si vous comparez cette journée à la première il y a cinq ans, dans quelle mesure le numérique prend-il le pas sur le reste ?
Il y a cinq ans, nous avons commencé avec un prototype à cinq emplacements différents. Nous avons touché près de 500 000 personnes. Ces quatre, cinq dernières années, les choses ont rapidement évolué, de sorte que cette année, nous serons présents à 20 emplacements en Suisse. Des cantons entiers sont actifs. Notre audience est désormais de deux millions de personnes. Il s’est donc passé beaucoup de choses. Et nous réalisons toujours des études qui montrent que la crainte vis-à-vis de l’évolution numérique a diminué au cours de ces cinq années.

Les gens comprennent de mieux en mieux le numérique, mais il reste toujours un grand potentiel à exploiter. Nous voulons aussi nous rendre dans les écoles, collaborer plus étroitement avec les PME et y encourager la prise de conscience pour l’importance de la numérisation. Notre équipe s’est donc fortement développée et nous avons aussi des conseillers fédéraux qui nous soutiennent. Guy Parmelin était notamment le parrain du lancement des Learning Labs en 2020. La Journée suisse du digital gagne en importance.

Pourriez-vous imaginer que les Learning Labs ou d’autres manifestations deviennent des offres permanentes ?
Oui, tout à fait. Pour le moment, nous concevons les six semaines qui précèdent la Journée suisse du digital sous leur forme actuelle, car nous croyons qu’elle crée une impulsion particulière au sein de la population. Dans cette phase préliminaire, chacun peut faire ses expériences. Sur cette base, les participants décident, dans l’idéal, s’ils veulent suivre un cours spécifique pendant l’année suivante.
Les six semaines avant la Journée suisse du digital sont idéales pour accroître l’intensité. C’est comme avec un festival du film, où on peut aller au cinéma pendant six semaines. Mais nous réfléchissons déjà à ce que nous pouvons proposer durant les autres mois de l’année.

Y a-t-il cette année déjà des offres qui resteront accessibles en ligne ?
Oui, tous les cours organisés sont téléchargés sur le site web, pour qu’ils puissent y être à nouveau consultés. Nous voulons aussi demander à la population quels sont les défis qu’elle rencontre ou quels sont ses souhaits. La question centrale de la journée est « Que souhaites-tu de l’avenir numérique ? ». Nous agirons ensuite en fonction des réponses.

De quoi a besoin la Suisse, son économie et sa société, en matière de numérisation ?
Nous sommes bien servis avec nos écoles, hautes écoles et universités. Mais l’affinité des Suissesses et des Suisses avec le numérique peut encore être développée. D’ici 2028, il manquera en Suisse 35’800 spécialistes des TIC. C’est effrayant. Dans ces conditions, la Suisse va devoir recruter des talents à l’étranger. Pourtant, avec nos écoles, nous disposons d’un immense potentiel. Nous aimerions le développer.

Comment entendez-vous procéder pour développer le potentiel numérique ?
Nous aimerions faire avancer un projet pour les écoles, les adolescents et l’apprentissage de toute une vie dans le cadre d’un partenariat. Il faut ancrer dans les esprits qu’une nouvelle ère commence et que la numérisation, l’innovation et la pensée axée sur les solutions doivent avoir leur place à l’école et dans toute formation, qu’il s’agisse de numérisation ou de travaux manuels. Cet aspect doit être intégré partout. Notons aussi que seulement 16% du personnel TIC est féminin, ce qui est extrêmement peu.

La phase préliminaire avec les Learning Labs est placée sous le signe de « l’apprentissage et du dialogue ». De quoi s’agit-il exactement ?
Au début, nous nous sommes concentrés sur la sensibilisation de la population, sur le fait que la numérisation était importante pour l’innovation et nous voulions que le public se mette à discuter ouvertement de ce sujet. Ces deux dernières années, l’objectif était que les personnes intéressées deviennent actives, participent aux discussions et échangent avec ceux qui ne partagent pas leur avis.
Nous aimerions que la population passe à l’action, qu’elle ne se contente pas de consommer passivement Tiktok et Instagram, mais qu’elle s’intéresse de plus près au thème de la numérisation. Les start-up sont un bon exemple: lorsque l’une d’elles a du succès, c’est lucratif ; tout l’écosystème des start-up est passionnant et très attractif. Nous aimerions inciter tout le monde à réfléchir sur ce sujet.

Quel rôle joue l’offre des Learning Labs dans ce contexte ?
Nous voulons allumer la flamme initiale. Il faut que les personnes intéressées pensent que l’offre est gratuite, que l’entreprise ou l’association est de toute manière passionnante et qu’elles aient envie de jeter un coup d’œil. Le premier seuil est très bas, pour permettre de commencer quelque chose. On se rend alors compte que le thème est passionnant, et qu’on aimerait le creuser davantage.

Nous espérons bien sûr qu’ensuite, ces personnes vont continuer de s’informer et se lancer dans une formation plus poussée. C’est pourquoi nous travaillons aussi volontiers avec des partenaires qui soutiennent cette évolution. Nous aimerions que les gens se forment davantage. Je remercie Pascal Schöni de mon équipe. C’est lui qui a créé ce format et enrichi la Journée suisse du digital d’une offre pour la population.

À quel point votre vie est-elle digitale ? Le coronavirus a-t-il eu une influence à ce niveau ?
Non, la crise sanitaire n’a pas changé grand-chose. Notre équipe était déjà très digitale. Un ordinateur portable nous suffit pour travailler. Nous sommes disséminés un peu partout mais nous nous réunissons régulièrement. Mon cadre de travail est très digital. Mais je remarque aussi qu’il est très important, pour mon équipe, d’avoir des échanges physiques. Sinon, on passe son temps en réunion sans possibilités d’échanges informels, alors que ceux-ci sont aussi très importants. Nous veillons donc à proposer un mélange des deux.

Et personnellement, qu’en est-il ?
Dans ma vie privée, il y a aussi des situations dans lesquelles j’opte sciemment pour les échanges réels. J’ai réappris à tenir un livre en main. C’est quand même une autre sensation qu’avec une liseuse. Je trouve cet équilibre judicieux. Notre avenir sera hybride.

Que souhaitez-vous de l’avenir digital ?
Qu’un très grand nombre de personnes en Suisse, mais aussi dans le monde entier, aient accès à la formation, par exemple grâce à des cours en ligne qui ne coûtent pas cher, mais qui sont de qualité. Si chacun a accès à ces offres, ce ne sera plus une question d’argent, mais de l’individu lui-même.

Interview: Bettina Whitmore

Learning Labs – Formation continue pour tous avant la Journée suisse du digital

Du 29 septembre auf 9 novembre 2021, vous avez la possibilité de participer à des événements physiques et en ligne dans toute la Suisse. Que vous souhaitiez développer vos compétences numériques ou discuter de l’avenir du numérique, vous êtes au centre de l’attention !

Image : Diana Engetschwiler est la directrice du projet Journée suisse du digital