Fotografie von Anne Parpan-Blaser, welches die Leitung über das Projekt "Digitale Transformation" inne hat.

Participation numérique des personnes en situation de handicap : état des lieux


Dans le cadre d’un projet qui fait partie du Programme national de recherche 77 « Transformation numérique », la Haute école de travail social FHNW étudie la participation numérique des personnes en situation de handicap dans la formation professionnelle initiale et continue. Si les technologies numériques élargissent les possibilités de participation, elles peuvent aussi créer de nouveaux obstacles, explique Anne Parpan-Blaser, membre de l’équipe de recherche et de la direction du projet.

Avec votre équipe de la Haute école de travail social FHNW, vous vous penchez sur la question de la participation numérique des personnes en situation de handicap dans la formation professionnelle initiale et continue. Pourquoi maintenant ?
Notre projet s’inscrit dans le Programme national de recherche 77, consacré à la transformation numérique. Nous sommes entrés dans ce programme par le biais de la deuxième mise au concours. Après la première mise au concours, il est apparu clairement qu’il fallait un projet dans le domaine des « personnes en situation de handicap ».

Comment votre projet est-il structuré ?
Le projet est conçu pour une durée de quatre ans et sera achevé en 2024. Il se compose de cinq volets principaux. Le premier volet comprenait des entretiens qualitatifs. Nous nous sommes entretenus avec 27 personnes en situation de handicap qui suivent une formation initiale ou continue. Nous avons également mené des entretiens avec dix spécialistes du domaine du handicap et de la formation professionnelle initiale et continue. Le deuxième volet comprend une enquête quantitative en cours auprès de prestataires de formation initiale et continue. Dans le cadre du troisième et du quatrième volet, il s’agira de regarder de près 16 prestataires de formation. Le cinquième volet comprendra la synthèse des résultats des volets précédents et l’élaboration de recommandations et d’un plan d’action avec un seul organisme de formation. En outre, nous publierons continuellement des résultats, principalement sous la forme d’articles et de conférences.

Pouvez-vous déjà dire quelque chose sur les résultats du premier volet ?
Nos résultats peuvent être regroupés en six domaines clés qui sont pertinents pour la participation numérique. Dans chacun de ces domaines, il existe des facteurs favorables et défavorables. On ne peut donc pas dire que la participation est totale ou inexistante. Elle est présente de manière graduelle, en fonction de l’environnement et de la situation d’apprentissage.

Quels sont ces domaines ?
Les six domaines sont : accessibilité, compétences, surcroît de travail, stratégies adaptatives, soutien et sensibilisation dans le sens d’une prise de conscience. En ce qui concerne l’accessibilité, on peut dire que, du point de vue des apprenant·e·s interrogé·e·s, la disponibilité numérique des contenus de cours représente une amélioration importante. Cependant, selon le logiciel utilisé ou l’application spécifique, selon le format de fichier, de nouvelles barrières peuvent apparaître. Du coup, ce qui serait en principe un avantage peut à son tour devenir un désavantage ou un handicap.

En ce qui concerne les compétences, les personnes en situation de handicap sont également confrontées à des exigences multiples. Souvent, elles amènent des compétences en matière d’utilisation des médias numériques issues d’autres contextes, très souvent de la sphère privée ou de leur formation préalable. Mais comme elles doivent travailler avec les outils les plus divers, elles sont confrontées à la nécessité d’actualiser sans cesse leurs compétences, ce qui entraîne un surcroît de travail. Les avantages s’accompagnent toujours de nouvelles difficultés liées à la numérisation. Ainsi, il n’est pas rare que les personnes en situation de handicap se voient dans l’obligation de compenser leur handicap. Pour ce faire, elles développent différentes stratégies, comme par exemple combiner des aides techniques ou utiliser des techniques de réduction du stress. Ces stratégies leur permettent de participer à la formation au niveau quotidien de manière aussi autonome que possible malgré les restrictions. Les médias numériques peuvent, d’une part, faire partie de ces stratégies adaptatives. Mais comme nous l’avons mentionné, ils peuvent également être la raison pour laquelle de nouvelles stratégies sont nécessaires.

Dans quel sens ?
Sur la base de notre travail préliminaire, nous savons que lors de l’achat d’un nouveau système, les prestataires de formation n’appliquent guère, comme critère de sélection, la compatibilité des interfaces avec les systèmes utilisés par les personnes en situation de handicap (par ex. lecteurs d’écran). Si de tels systèmes sont utilisés, les personnes en situation de handicap se voient confrontées à un surcroît de travail important ou à l’exclusion.

Et où se situent les difficultés en termes de soutien ?
Souvent, le soutien est situationnel ou informel. Mais il existe bien des mesures de soutien qui sont planifiées et mises en place par les institutions et dont les processus sont définis. Cependant, les offres de soutien se basent souvent sur une approche qui considère la personne concernée comme différente, spéciale. Cela peut avoir l’effet d’une stigmatisation. C’est pourquoi il est très important que les mesures institutionnelles de soutien soient bien communiquées, non seulement aux personnes en situation de handicap, mais à toutes les personnes qui fréquent la formation avec elles et qui doivent comprendre pourquoi, par exemple, une compensation des désavantages est accordée. Il serait bien sûr encore mieux de disposer de structures et de settings inclusifs qui améliorent l’accessibilité pour tou·te·s, de sorte qu’aucune mesure spécifique ne soit nécessaire.

Que souhaitent les personnes en situation de handicap ?
D’une part, les apprenant·e·s en situation de handicap souhaitent que leur situation soit comprise. Il s’agit pour elles et eux d’être sensibles à leur situation de vie et de formation. Cela signifie que l’institution doit comprendre que les personnes en situation de handicap sont toujours confrontées à un surcroît de travail. Maintenir cette charge supplémentaire à un niveau aussi bas que possible est une demande centrale. D’autre part, les apprenant·e·s en situation de handicap souhaitent également vivre dans l’autonomie et ne pas être considéré·e·s comme des cas particuliers. Une meilleure accessibilité rend les offres individuelles de soutien superflues et réduit la charge supplémentaire à un niveau qui ne pèse pas trop sur l’apprentissage proprement dit.

Et c’est là que la numérisation peut à nouveau aider ?
Le besoin d’assistance diminue avec l’augmentation de l’accessibilité numérique. Les personnes interrogées s’en félicitent. Cela leur permet d’être autonomes. Lors des entretiens, les personnes interrogées ont également exprimé le souhait que certains services ou prestations, comme l’établissement de la carte d’étudiant·e, soient proposés en ligne. Dans l’ensemble, les personnes concernées estiment que certains progrès ont été réalisés précisément à l’époque de Corona. Elles espèrent maintenant que la roue ne tournera pas en arrière. Par exemple, la possibilité d’enregistrer les cours et de les visionner à nouveau est très appréciée.

Les prestataires de formation continue sont-ils déjà suffisamment sensibilisés aux personnes en situation de handicap ?
L’une des personnes interrogées a trouvé très soulageant qu’on lui ait demandé quels étaient ses besoins avant qu’elle ne commence sa formation complémentaire. Cependant, comme cela nous a été rapporté, c’est souvent l’inverse qui se produit. Les apprenant·e·s en situation de handicap doivent généralement s’adresser de manière proactive aux prestataires de formation. Souvent, il n’est pas non plus clair à qui elles et ils peuvent s’adresser, de sorte qu’il n’est pas rare qu’elles et ils doivent prendre contact avec l’instance supérieure, la direction. Il n’est pas rare non plus qu’elles et ils doivent effectuer un certain travail d’explication.

Vous avez évoqué la pandémie, qui a déclenché une forte poussée de numérisation dans la formation continue. L’enseignement en ligne est-il entièrement positif pour les personnes en situation de handicap ?
Pour les un·e·s, le fait de ne pas devoir se rendre sur place et de pouvoir en quelque sorte rester dans une sorte d’espace protégé a été un grand soulagement. D’autres ont senti, dans les sessions en ligne, le manque de contacts informels leur permettant de mieux évaluer la situation sociale et de développer ainsi plus de sécurité ou d’obtenir un soutien. Sur ce sujet non plus, tout n’est pas noir ou blanc.

Le deuxième volet du projet comprend une enquête en ligne en trois langues auprès des prestataires de formation professionnelle et de formation professionnelle continue dans toute la Suisse. Qui avez-vous interrogé ?
Nous avons envoyé le questionnaire à environ 1550 responsables d’organismes de formation professionnelle initiale et continue en leur demandant de participer elles-mêmes et eux-mêmes à l’enquête et de la transmettre aux personnes de leur organisation qui s’occupent des thèmes de la numérisation, de l’inclusion et/ou de la participation numérique des personnes en situation de handicap. Parmi les organisations interrogées, on trouve des organismes de formation professionnelle de niveau secondaire II, des organismes de formation professionnelle pour les apprenant·e·s en situation de handicap, des écoles supérieures, des hautes écoles spécialisées et des hautes écoles pédagogiques ainsi que des prestataires de formation continue organisés au sein de la FSEA.

Et qu’avez-vous demandé ?
Nous voulions tout d’abord en savoir plus sur la numérisation au sein de l’organisation de formation, sur la manière dont les transformations dans ce domaine sont évaluées et sur l’équipement technique et numérique de l’organisation. Nous avons également demandé des appréciations sur le thème de l’inclusion, s’il existe des stratégies dans ce domaine et ce qu’il en est de la pratique de la formation continue pour les collaborateurs et collaboratrices. Nous nous sommes ensuite intéressés à la manière dont l’organisation gère les demandes spécifiques liées au handicap, par exemple la compensation des désavantages ou l’accessibilité numérique.

Pouvez-vous déjà nous parler des résultats ?
Il est encore trop tôt pour cela. Mais je peux dire que le taux de réponse est globalement satisfaisant. Toutefois, nous aimerions recevoir plus de réponses de la part des prestataires de formation continue.

Ne faut-il pas s’attendre à ce que les institutions qui participent à l’enquête soient surtout celles qui ont déjà une plus grande sensibilité à l’égard des apprenant·e·s en situation de handicap ?

Nos questions ne contiennent aucun jugement de valeur. En ce sens, la participation à l’enquête est également possible pour les institutions dont l’offre de formation n’a encore jamais été suivie par des personnes en situation de handicap ou qui n’ont pas encore beaucoup réfléchi à la participation numérique. Des participant·e·s nous ont signalé que nos questions les incitaient à réfléchir. Ce type de retours indique que notre enquête contribue à la sensibilisation.

Les prestataires de formation continue pourront-ils profiter directement de votre travail ?
Outre les connaissances scientifiques, l’élaboration de recommandations fait également partie de notre travail. La semaine dernière, nous avons justement discuté des premières recommandations avec le conseil consultatif du projet. Nous avons reçu des retours importants pour la suite du travail, tant sur le contenu que sur la manière dont les recommandations pourront être transmises aux acteurs concernés sous une forme appropriée.

Entretien : Ronald Schenkel

L’enquête en ligne sur l’e-inclusion des personnes en situation de handicap dans la formation est ouverte jusqu’au 9 octobre 2022. Participez-y vous aussi !

Anne Parpan-Blaser est chargée de cours à l’Institut pour l’intégration et la participation de la Haute école de travail social FHNW. (Photo : FHNW)