Compétences de base dans la formation professionnelle: enseignements tirés du projet Helvetas au Mozambique 


Depuis deux ans, Helvetas et la FSEA s’engagent au Mozambique: dans le cadre du projet SIM!, des jeunes adultes sont formés et des formatrices et formateurs sont soutenus à l’aide du modèle GO. Voici les enseignements tirés jusqu’à présent. 

Le Mozambique est l’un des pays les moins développés au monde. Entre 2014 et 2020, le taux de pauvreté national est passé de 48 % à 63 %. Le chômage des jeunes a atteint 43 % pendant la même période, les jeunes femmes étant particulièrement touchées. 

Selon une enquête menée par Helvetas auprès de 545 jeunes, les jeunes adultes en formation ont en moyenne 20 ans et 30 % d’entre eux ont déjà un enfant. 77 % ont accès à des terres agricoles appartenant à leur famille et 78 % préfèrent une activité indépendante à un emploi formel. 

En outre, 78 % d’entre eux ont abandonné l’école et 40 % n’ont fréquenté que l’école primaire en raison de contraintes économiques ou de l’éloignement de l’école. De manière générale, le taux d’alphabétisation des femmes adultes au Mozambique est de 45 %, contre 73 % pour les hommes.  

Depuis 2017, Helvetas soutient des projets au Mozambique qui se concentrent sur l’amélioration de la formation informelle des apprentis. 

Combler les lacunes en matière d’éducation 

Le projet «Skills for Youth in Mozambique» (SIM!) vise à combler les lacunes en matière d’éducation et à redéfinir les interfaces entre l’éducation de base et la formation professionnelle. En intégrant les compétences en lecture, en écriture et en calcul dans la formation professionnelle, SIM! transmet aux jeunes et aux adultes les compétences de base dont ils ont besoin pour réussir leur vie professionnelle, favorisant ainsi l’inclusion et le développement durable des communautés.  

Depuis son lancement début 2023, ce projet financé par la Confédération et mis en œuvre par Helvetas a formé environ 3600 jeunes, avec le soutien de 221 artisans locaux qui font office de formateurs et de sept entreprises qui s’engagent dans cette initiative. Le modèle de formation combine quatre mois d’enseignement théorique et pratique avec un stage de deux mois qui permet d’acquérir une expérience directe sur le lieu de travail ainsi que des compétences. En collaboration avec cinq établissements de formation professionnelle, le projet améliore également les compétences techniques et pédagogiques des formateurs locaux, garantissant ainsi un développement durable des compétences. 

Le projet souligne que l’apprentissage doit avoir lieu là où il est le plus important, c’est-à-dire dans des environnements de travail réels. (En Suisse, le programme prioritaire «Simplement mieux!… au travail» suit la même approche). Dans les cours de maçonnerie, par exemple, les apprenants s’exercent à lire des plans de construction et à calculer les matériaux, tandis que dans la formation en agriculture, ils effectuent des tâches de comptabilité et de budgétisation. Cela met en évidence l’utilité de la formation, ce qui la rend plus pertinente et plus efficace. Des modules tels que «Les bases de la géométrie pour la construction», «Sécurité et hygiène au travail» et «Compétences financières pour les entrepreneurs» permettent par exemple aux participants d’appliquer immédiatement leurs nouvelles compétences dans leur travail quotidien. 

Compétences de base sur le lieu de travail 

Le modèle GO développé par la FSEA est utile à cet égard: il intègre l’enseignement des compétences de base sur le lieu de travail afin que les employés puissent renforcer leurs compétences en lecture, en écriture, en calcul ainsi que leurs compétences numériques dans l’exercice de leurs tâches quotidiennes. Cette approche axée sur le lieu de travail et adaptable répond directement aux besoins des entreprises et convient aux entreprises de toutes tailles. Au Mozambique, elle contribue à combler les lacunes critiques en matière de compétences fonctionnelles en lecture, écriture et calcul, qui ont un impact sur la productivité et la sécurité. 

Le modèle propose également des parcours d’apprentissage flexibles, adaptés à différents niveaux de formation, les formations se déroulant souvent dans des établissements communautaires proches du lieu de résidence des participants. Des méthodes mixtes et des outils numériques améliorent l’accessibilité, en particulier dans les zones reculées. 

Une caractéristique essentielle du modèle est l’investissement du secteur privé dans le développement de la main-d’œuvre. Les entreprises soutiennent l’apprentissage sur le lieu de travail et bénéficient d’une meilleure fidélisation de leurs employés, d’une efficacité accrue et d’une meilleure exécution des tâches. 

Enseignements tirés de deux années 

Deux ans après le lancement du projet, les évaluations des participants, les enquêtes et les retours des entreprises ont permis d’adapter les formations aux besoins des apprenants. 

Principaux enseignements 

  1. Renforcement des compétences pédagogiques et techniques des formateurs en artisanat. Étant donné que les artisans locaux jouent un rôle important en tant que formateurs sur le lieu de travail, il est essentiel d’investir dans leur formation pédagogique et technique. Au-delà de l’amélioration de leurs propres compétences techniques, ils doivent développer des méthodes d’enseignement efficaces pour s’adapter à différents rythmes d’apprentissage et à différents contextes. Des ateliers de renforcement des capacités, des échanges entre pairs et la coopération avec des établissements de formation professionnelle améliorent leur capacité à former efficacement les apprentis. L’implication des artisans et des associations locales dans l’élaboration du contenu garantit que le matériel de formation reflète la réalité économique et professionnelle locale et que les connaissances acquises sont directement applicables. 
  1. Garantir une infrastructure et des supports qui favorisent un apprentissage efficace. Les cours d’alphabétisation et de calcul intégrés dans le quotidien professionnel nécessitent un espace propice à l’apprentissage, avec un minimum de perturbations et un accès à du matériel de formation durable. Le bruit des machines ou l’absence d’espaces d’apprentissage adaptés peuvent nuire à la concentration et à l’engagement. Afin d’améliorer l’accessibilité, des illustrations, des diagrammes et des supports visuels sont utilisés, en particulier dans les environnements multilingues. Le matériel de formation doit également être portable, durable et facilement adaptable afin de pouvoir être utilisé sur différents lieux de travail. 
  1. Les modèles axés sur la communauté améliorent la portée et la durabilité. L’implication d’animateurs locaux, d’artisans et d’organisations communautaires garantit que les formations sont accessibles, fiables et adaptées aux besoins des populations rurales. Les animateurs, qui sont souvent bénévoles, jouent un rôle essentiel dans la mobilisation des participants et la promotion de la dynamique de groupe, ce qui rend le modèle durable même dans des environnements pauvres en ressources. Leurs liens étroits avec la communauté garantissent que les groupes défavorisés, y compris les personnes déplacées à l’intérieur du pays, ont également accès à des possibilités de formation. 
  1. Les formations intégrées améliorent les résultats économiques et la productivité. L’ancrage des compétences de base dans la formation professionnelle présente des avantages financiers concrets pour les travailleurs et les employeurs. Selon le PIAAC, les travailleurs qui ont de meilleures compétences en lecture, en écriture et en calcul peuvent gagner jusqu’à 20 % de plus. Les données du projet montrent que 40 % des apprentis, en particulier ceux ayant un niveau d’éducation équivalent à la 10e année ou moins, ont obtenu un revenu supérieur de 15 % après avoir terminé leur formation. Pour les entreprises, la formation continue de leur personnel se traduit par une plus grande efficacité, moins d’erreurs opérationnelles et une plus grande fidélisation des employés. 
  1. Le renforcement des compétences de base apporte des avantages durables à toutes les parties prenantes. Le programme va au-delà des compétences en lecture, écriture et calcul et transmet aux travailleurs des compétences transversales importantes, notamment en matière de santé et de sécurité, de compétences numériques, de gestion financière et d’entrepreneuriat. Ces compétences sont de plus en plus demandées par les employeurs et améliorent la capacité d’adaptation des travailleurs sur des marchés du travail dynamiques. Le renforcement de ces domaines profite non seulement aux travailleurs individuels, mais contribue également à la résilience et à la capacité d’innovation des entreprises. 
  1. Une conception inclusive des formations est essentielle pour répondre aux différents profils d’apprentissage. De nombreux apprenants sont confrontés à des contraintes économiques, à des inégalités entre les sexes et à des obligations familiales auxquelles le système d’enseignement formel ne répond souvent pas. Afin de lever ces obstacles, les formations sont dispensées dans des établissements communautaires situés à proximité du lieu de résidence des participants, où des animateurs locaux adaptent le contenu aux différents besoins d’apprentissage. Les formations doivent intégrer différentes approches pédagogiques, notamment un langage simplifié, des supports visuels et des méthodes d’enseignement interactives, afin de garantir la participation effective des apprenants ayant des niveaux de lecture, d’écriture et de calcul différents. 

Plus d’informations